Mum : une série anglaise qui sublime l’ordinaire

7 septembre 2024

Parfois, la télévision se distingue par des œuvres simples et sincères. Mum, série britannique lancée en 2016 sur BBC Two, en est un parfait exemple. Créée par Stefan Golaszewski (Him & Her), cette comédie dramatique explore avec douceur la vie d’une femme ordinaire. Grâce à des acteurs talentueux et un scénario minimaliste mais puissant, Mum transcende le quotidien pour offrir une réflexion émouvante sur le deuil, l’amour, la famille et la reconstruction de soi.

Une simplicité qui frappe

Ce qui frappe d’emblée avec Mum, c’est son refus de se conformer aux conventions habituelles des séries dramatiques. Ici, pas de grands drames ni d’intrigues à rebondissements. L’histoire est ancrée dans la banalité du quotidien, mais c’est précisément là que réside sa force. La série se déroule sur trois saisons, chacune représentant une année de la vie de Cathy, une femme récemment veuve qui doit faire face à la perte de son mari tout en continuant à s’occuper de sa famille et à naviguer dans ses propres émotions.

Chaque épisode couvre une journée particulière, souvent un événement familial ou une rencontre anodine, comme un anniversaire ou une fête de Pâques. Ce choix narratif, loin d’être ennuyeux, permet de plonger profondément dans les dynamiques familiales et les nuances des relations humaines. C’est dans cette simplicité que la série trouve son authenticité. Mum nous rappelle que ce sont les petits moments de la vie qui, accumulés, définissent qui nous sommes et comment nous avançons.

L’une des grandes réussites de Mum est sa capacité à traiter des émotions complexes sans jamais tomber dans l’excès. La série aborde des thématiques lourdes comme le deuil, la solitude et la reconstruction, mais le fait avec une telle légèreté et une telle finesse que l’on est touché sans être submergé. Le spectateur n’est jamais pris à la gorge par des scènes trop dramatiques ou des larmes forcées. Au contraire, la série distille ses émotions avec parcimonie, laissant place à des moments de silence ou à des regards qui en disent bien plus que de longs dialogues.

Ce ton feutré est en grande partie dû à l’écriture de Stefan Golaszewski. Le créateur, déjà acclamé pour sa manière de capturer l’intimité dans Him & Her, récidive ici avec un scénario qui repose autant sur les non-dits que sur les répliques. Les scènes sont souvent courtes, avec peu de dialogue, mais chaque mot, chaque geste compte. L’humour, quant à lui, est subtil, sec et typiquement britannique. Il se glisse avec naturel dans les interactions, apportant une légèreté bienvenue qui empêche la série de sombrer dans le mélodrame.

Lesley Manville, une performance magistrale

Au centre de Mum, il y a Cathy, merveilleusement interprétée par Lesley Manville. Actrice britannique de renom, connue pour ses rôles dans les films de Mike Leigh (Another Year, Secrets & Lies), Manville apporte une profondeur et une humanité incroyables à ce personnage. Cathy n’est ni héroïne, ni victime. C’est une femme normale, avec ses forces et ses faiblesses, ses moments de doute et ses instants de courage. Et c’est précisément ce qui la rend si captivante. Manville joue avec une telle justesse qu’elle parvient à faire passer des émotions complexes avec un simple sourire ou un regard perdu dans le vide.

La performance de Manville est d’autant plus remarquable qu’elle repose sur la retenue. Cathy est une femme qui cache ses émotions sous une surface calme et posée, mais l’actrice laisse transparaître, dans chaque scène, la douleur sourde du deuil et la difficulté à aller de l’avant. Son jeu est d’une subtilité rare, et c’est ce qui permet au spectateur de s’attacher autant à son personnage.

Mais Mum ne serait pas ce qu’elle est sans ses personnages secondaires. Chaque membre de la famille de Cathy, bien que parfois caricatural, apporte une dimension différente à l’histoire. Son fils Jason (Sam Swainsbury), immature et amoureux d’une femme superficielle, Kelly (Lisa McGrillis), ou encore son frère Derek (Ross Boatman), gauche et maladroit, sont autant de personnages qui viennent enrichir l’intrigue par leurs propres complexités.

Cependant, c’est sans doute Peter Mullan, dans le rôle de Michael, l’ami de longue date de Cathy, qui se démarque le plus. Sa relation avec Cathy est au cœur de la série et constitue une des intrigues les plus touchantes. Michael, secrètement amoureux de Cathy, attend patiemment qu’elle soit prête à aimer à nouveau après la mort de son mari. Leur dynamique est empreinte d’une tendresse infinie et d’une délicatesse émotive qui fait écho aux spectateurs. Mullan, avec sa prestation tout en nuances, ajoute une dimension poignante à cette relation qui ne se dit jamais ouvertement.

Un portrait honnête de la famille

La série dépeint avec beaucoup de vérité la complexité des relations familiales. Chaque personnage a ses défauts, ses travers et ses moments d’égarement, mais tous sont peints avec une profonde humanité. Que ce soit Kelly, souvent source de moments comiques par son manque de subtilité, ou la belle-mère de Cathy, qui ne cesse de faire des remarques désobligeantes, ces personnages permettent à la série de naviguer constamment entre le rire et l’émotion.

Ce portrait familial, loin d’être idéalisé, montre à quel point les liens familiaux peuvent être à la fois source de réconfort et d’irritation. Mais au-delà des conflits et des incompréhensions, Mum souligne que la famille, avec toutes ses imperfections, est un socle indispensable pour affronter les épreuves de la vie.

La réalisation de Mum est tout aussi subtile que son écriture. Réalisée par Richard Laxton, la mise en scène se veut minimaliste, se concentrant sur les visages et les interactions entre les personnages. La caméra reste souvent fixe, capturant les scènes comme si le spectateur était une simple mouche sur le mur, témoin silencieux des moments de la vie de Cathy. Cette approche permet de renforcer l’intimité de la série et de mettre en avant la qualité des dialogues et des performances.

Le choix de limiter l’action à la maison de Cathy ou à des lieux familiers du quotidien, comme un jardin ou une cuisine, contribue à l’ambiance chaleureuse et réaliste de la série. Chaque détail, du décor à la lumière naturelle, sert à immerger le spectateur dans ce quotidien presque ordinaire mais profondément chargé d’émotions.

En conclusion, Mum est une série qui se savoure lentement, comme un bon livre, et qui reste longtemps dans l’esprit de ceux qui la regardent. Une œuvre d’une humanité rare, qui nous rappelle que même dans les moments les plus ordinaires, se cachent parfois les plus grandes émotions.

>>> Découvrez le premier épisode de Mum. Le reste des épisodes sont disponibles sur la page Youtube d’Arte.

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