Le dossier de l’agrément d’Anticor continue de faire des vagues. Ce 4 septembre, le tribunal administratif de Paris a tranché en faveur de l’association de lutte contre la corruption, ordonnant à Matignon, et en particulier au Premier ministre démissionnaire Gabriel Attal, de réexaminer la demande d’agrément de l’organisation sous un délai de 24 heures. Faute de quoi, une astreinte de 1 000 euros par jour de retard sera appliquée.
Une politisation de l’agrément
Cette décision judiciaire met fin à plusieurs mois de silence gouvernemental sur ce sujet épineux. En effet, Anticor, qui avait perdu son agrément en 2023, n’a cessé de réclamer son rétablissement afin de continuer à jouer son rôle clé dans la lutte contre la corruption en se constituant partie civile dans les affaires où le parquet est resté inactif.
Le tribunal avait déjà, le 9 août, sommé le Premier ministre de se prononcer sur cette demande dans un délai de quinze jours. Pourtant, aucune réponse n’a été apportée par Gabriel Attal, provoquant ainsi la colère de l’association. « Le non-respect d’une décision de justice par le gouvernement est grave et inquiétant », a réagi Paul Cassia, président d’Anticor. Il dénonce une politisation de l’agrément qui, selon lui, devrait rester une procédure strictement administrative.
La stratégie de silence adoptée par le gouvernement est critiquée, notamment par l’avocat d’Anticor, Me Vincent Brengarth, qui considère cette résistance comme symptomatique d’un malaise politique autour de ce dossier.
Un enjeu crucial pour l’État de droit
Pour Anticor, l’enjeu est de taille. L’association, impliquée dans plus de 160 procédures judiciaires, se voit privée de son principal levier juridique pour lutter contre les dérives politico-financières, à l’instar de l’attribution controversée du Mondial de football au Qatar ou encore l’enquête visant Alexis Kohler, secrétaire général de l’Élysée.
La justice a estimé que la demande d’agrément relevait des « affaires courantes » et devait être traitée même par un gouvernement démissionnaire. Malgré l’imminence de la formation d’un nouveau gouvernement, cela ne justifie en rien, selon le tribunal, l’inaction persistante du cabinet de Gabriel Attal. Une posture que déplore également Paul Cassia : « Le Premier ministre a eu tort de transformer la question de l’agrément d’Anticor en une affaire politique alors que c’est une question d’ordre purement juridique ».
La question du futur gouvernement
La nomination imminente d’un nouveau Premier ministre ne devrait pas modifier la situation, puisqu’il ne s’agit pas d’une affaire personnelle, mais bien de la fonction de Premier ministre. Le prochain locataire de Matignon devra donc également se saisir du dossier. En attendant, l’astreinte financière court toujours et pourrait devenir un fardeau pour le gouvernement si celui-ci continue d’ignorer les injonctions de la justice.
La saga Anticor illustre une tension persistante entre l’exécutif et le judiciaire sur des questions de transparence et de lutte contre la corruption. Elle met en lumière la difficulté pour une association citoyenne de faire valoir ses droits face à l’inertie d’un gouvernement qui semble peu pressé de répondre. Une situation qui pourrait bien résonner au-delà des cercles politiques, interrogeant l’état de l’État de droit en France.